« Comment le yoga peut bousiller votre corps »,titrait il y a peu le New York Times dans un long article de plus de cinq
pages. « Ah bon ? »,le yoga, on l’associe
pourtant au calme et à la douceur.
Le récit est écrit à la première personne et son auteur, William J.
Broad, qui pratique le yoga, explique qu'il s'est fait mal au dos.(...)
Certes, quand on le prend pour un
sport, le yoga peut abîmer le corps, c'est une évidence! Le yoga n'est pas un sport et qu’on puisse se faire mal en faisant du yoga,oui! Mais une blessure est d’abord le signe d’une mauvaise pratique.On va se faire mal si on change de prof et de technique tout le temps ou si
on essaie d’aller trop vite car pour faire du yoga, il faut du temps et un cheminement cohérent.
L’ahimsa : « ne pas nuire »
Les nouveaux pratiquants sont trop souvent
attirés par un effet de mode alors que le yoga c’est un point de vue sur le monde, une sagesse et
l’un de ses premiers principe c’est l’ahimsa: “ne pas nuire, la non-violence.” Ne pas se faire mal, la bienveillance, c’est l’essence même du yoga et si les gens se font mal, c’est surtout parce qu’ils font
des choses qui ne ressemblent pas tellement à du yoga.
Devenue "super -tendance", la pratique a attiré vers elle de plus
en plus de monde. Aujourd’hui, en France, 3 millions de personnes
déclarent faire du yoga. Autant que le tennis.Aux Etats-Unis, l’engouement est particulièrement fou et le New
York Times raconte, dans son article, un passage de 4 millions de
pratiquants en 2001 à 20 millions aujourd’hui.
« Les gens font de l’acrobatie, pas du yoga »
Il y a de nouvelles formes de yoga, qui ont émergé pour attirer le
public, comme le “yoga trend” , le yoga suspendu, le power-yoga et.c . Des déclinaisons du yoga introduites comme des sports et qui sont aujourd’hui en pleine
effervescence.Les cours sont nombreux...Ces nouvelles pratiques, ce sont des “curiosités”. Les gens
y font de l’acrobatie et ce n’est pas du yoga . Dénicher un vrai cours de hatha-yoga
aujourd’hui, c’est comme chercher une bonne assurance : c’est la
jungle.
Les "bons" prof's martèlent :« Le yoga, ce n’est pas du sport.
Il n’est jamais question de compétition dans le yoga."
« Tout le cours a été super bizarre »
Un exemple trouvé sur un blog: Louise, 28 ans. Elle faisait déjà du « power yoga » mais elle a
voulu tenter un cours d’ « ashtanga yoga ». Habituée à des
mouvement plus doux, elle a un peu halluciné.
« C’était super sportif, et tout le cours a été bizarre. Le prof a commencé par chanter une chanson en indien, tout le monde l’a suivi. Ensuite, il fallait tenir sur les deux mains avec les bras pliés. Je ne sais pas faire ça moi ! »C’est précisément ainsi que Louise aurait pu se blesser. Elle a d’ailleurs été surprise par le manque d’encadrement de ce cours.« Il y a des filles qui viennent pour l’exploit physique. Elles veulent une souplesse de fou. D’habitude, en yoga, il ne faut jamais forcer : le but étant d’être pile à l’endroit où tu te sens bien. »
Le yoga victime du marketing
Il s’agit d’un dévoiement du yoga et si un prof vous dit de vous mettre sur la tête, alors que c’est votre premier cours, partez en courant ! C’est un non-sens.
Le yoga est au coeur d’une démarche marketing, celle où l’on place le mot « zen » à toutes les sauces.On va acheter sa "zénitude" vite fait , façon fast-food.Alors que pour faire du yoga, on n’a besoin que de son corps, sa respiration, l'attention portée à soi. On prend l’homme tel qu’il est.
Avant de se lancer dans je ne sais quelle gymnastique intempestive à effets secondaires non désirés,on peut recommander la lecture des Yoga-Sutra de Patanjali,( cf notre bibliothèque). Cela remet très vite les pendules à l’heure par rapport à la dérive américaine actuelle.
Je donne la parole à une prof intervenue sur un blog , à propos de cet article du NYT.
"Hum, il y a un amalgame/confusion très gênant à propos de ce que l’on connait en France sous le nom d’ashtanga viniyasa yoga qui est une pratique traditionnelle et ancienne directement inspirée du Yoga Korunta et enseignée depuis plus de trente ans chez nous... Rien à voir avec les déclinaisons anglo - saxonnes de type « power yoga » qui s’orientent vers une logique de résultat commercial, physique, sensationnel, etc.
L’ashtanga viniyasa yoga est une pratique dynamique et engagée, guidée par le souffle, et les professeurs qui l’enseignent selon les préceptes de Sri Pattabhi Jois le font dans le respect du principe de l’ahimsa, à l’instar de toute autre école de Hatha Yoga digne de ce nom.
Ainsi, la pratique avancée de l’ashtanga n’est proposée qu’aux élèves prêts à s’y engager. Si cette pratique reprend des postures (simples ou avancées) communes aux différentes approches posturales du Hatha Yoga, c’est dans l’art de l’enchainement de ces postures et du contrôle du souffle que l’ashtanga yoga fonde sa spécificité.
De plus, cette pratique se construit sur l’idée de la série : les postures s’enchainent selon un ordre immuable (la guirlande) d’abord dans une série simple, que l’élève doit pratiquer harmonieusement avant d’envisager de découvrir une série plus complexe. La grande majorité des pratiquants se contente de la première série, le but n’étant pas d’accumuler les postures, mais de pratiquer en harmonie avec soi...
Rien n’empêche, ensuite, les pratiquants les plus engagés, d’approfondir leur démarche corporelle, mais toujours dans le respect de l'ahimsa...
On est très loin de la description proposée par l’article du NYT..
L’ashtanga souffre de deux maux : des enseignants peu scrupuleux qui discréditent cette belle pratique en la réduisant à l’enchainement de postures acrobatiques à des fins commerciales et des détracteurs qui profitent de l’aubaine pour jeter le bébé avec l’eau du bain... Cet article fait débat sur les réseaux depuis sa publication sur le NYT. En effet, on peut se blesser en pratiquant. Mais ce qui est mis en avant ici reflète les excès du yoga anglo- saxon, bien plus compétitif que ce qu’est en réalité le yoga.
Quand je lis qu’une jeune pratiquante débutante se déplace une cervicale en faisant la roue, le prof que je suis sursaute sur son tapis. La roue est déjà une posture très avancée et, il y a des déclinaisons beaucoup plus simples pour ressentir les mêmes les bénéfices. De plus dans cette posture, on se doit de justement relâcher les cervicales. Donc le prof avait tout faux.
La problématique posée concerne plus l’information qui doit être donnée aux nouveaux pratiquants, attirés par un effet de mode ; des cours où des dizaines de personnes se bousculent. Pour moi, le bikram est la forme la plus dangereuse pour un pratiquant novice, et on demande de signer une décharge en cas d’accident. Ceci n’est pas normal à mon sens, car les dispositions physiques réclament une condition excellente. Et comme par hasard, cette forme de pratique (au demeurant intéressante pour des sportifs de haut niveau, des danseurs) vient des Etats Unis et se développe en Europe (France, Belgique, Suisse ....)
Cet article ne reflète pas la réalité de la discipline, axée sur un travail sur soi, une recherche de réconciliation entre son mental, sa conscience et son corps. L’engagement corporel n' est qu' un élément de cette recherche. C’est aux profs de le comprendre et le faire savoir, et c’est aussi aux élèves de ne pas s’exposer à une pratique trop exigeante pour eux. Si ça force, il faut savoir s’arrêter. C’est d’alleurs un enseignement majeur du yoga que de respecter son corps.
Sans cela, le yoga procure des effets bien positifs sur la santé et sur le mental.
On ne le cite pas ici et c’est dommage, mais il a été prouvé aujourd’hui que la pratique par des patients cancéreux diminuait de façon drastique les effets secondaires d’une chimiothérapie.Une une autre étude confirme que la pratique, réalisée dans un encadrement propice, faisait reculer les problèmes de dos d’une façon significative.
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